Les troubles psychiques et les indications majeures de l’art-thérapie
Troubles anxio-dépressifs : redonner souffle au récit intérieur
Les troubles anxieux et dépressifs représentent une part majeure des motifs de recours à l’art-thérapie chez l’adulte. Le rapport de l’OMS de 2022 précise que la dépression touche 280 millions de personnes dans le monde et constitue une cause majeure de handicap. La parole y est souvent appauvrie, répétitive, « piégée » dans un cercle de ruminations.
L’acte de créer sollicite alors d’autres voies de transformation psychique, en engageant le corps et la sensorialité. Les médiations plastiques (peinture, modelage, collage, etc.) permettent d’exprimer des affects inaccessibles autrement, d’esquisser des formes symboliques là où le langage verbal se dérobe. Les études cliniques, dont celle publiée par la revue Arts in Psychotherapy (2015), mettent en valeur la diminution notable des scores anxieux et dépressifs chez des patients adultes après quelques mois d’accompagnement art-thérapeutique structuré.
Psychotraumatismes : quand la parole ne suffit plus
Les troubles post-traumatiques (ESPT) et les traumas complexes laissent souvent le sujet confronté à une mémoire fragmentée, parsemée de « trous noirs », d’images figées ou intrusives. Judith Herman (Trauma and Recovery, 1992) souligne combien, dans ces tableaux, le verbe « ne suit pas » l’expérience. L’art-thérapie devient alors un espace d’expérimentation où le vécu peut s’inscrire autrement qu’en mots : gestes, couleurs, formes, rythmes.
L’Art Therapy Trauma Group Model, développé aux États-Unis, a permis d’observer (Clouston, 2019) une réduction significative des symptômes d’hypervigilance et de dissociation chez les adultes participants, ainsi qu’une amélioration de la conscience corporelle et de l’estime de soi. L’engagement dans le processus créatif permet de recomposer la continuité psychique, d’élaborer ce qui était indicible.
Troubles psychotiques : soutenir la symbolisation
La psychose adulte se caractérise par une fragilité des limites du Moi, une confusion entre réalité et imaginaire, ainsi que par une difficulté majeure à élaborer des représentations stables et partagées. L’art-thérapie, en offrant un support concret – le papier, la terre, la toile – permet de réinventer des frontières symboliques et de différencier intérieur/extérieur.
Dans les unités psychiatriques, la médiation artistique s’intègre désormais dans les plans de soins de nombreux patients psychotiques. Une étude multicentrique française (Déri, 2019, L’Encéphale) indique que 70% des sujets psychotiques engagés dans un protocole art-thérapeutique montrent une amélioration du sentiment de cohérence interne et une moindre fréquence d’agitations ou d’idées délirantes. L’esthétique, ici, n’est jamais un but, tout est dans le processus.